« Un jour, le plus puissant roi de la terre, fuyant une terrible catastrophe, rencontra sur son chemin un tout petit poussin couché les pattes en l’air, il lui demanda : « Petit poussin, pourquoi te couches-tu les pattes en l’air, au lieu de fuir ? Ne sais-tu pas que bientôt le ciel va tomber sur la terre ? » « Je le sais, répondit le petit poussin ; c’est pour cela que je me couche les pattes en l’air : je cherche à retenir le ciel ; chacun fait ce qu’il peut, oui, chacun doit faire ce qu’il peut pour retenir le ciel. », Williams Sassine, Saint monsieur Baly, p. 101.
Pour sa survie, l’humain s’autorise bien des portes de sortie. Elles sont toutes fort louables, ce me semble, quand il s’agit d’une catastrophe naturelle à l’instar de ce que problématise Sassinne dans ce texte. En revanche, ces portes de sorties – la fuite, la lutte et la résignation – n’ont pas toutes la peau chère lorsque l’aventure humaine se conjugue avec un contexte socio-politique malsain et chaotique. Dans ce cas d’espèce, même si la fuite peut se révéler salvatrice, il n’en demeure pas moins qu’elle reste une solution lâche et peu amène, puisqu’elle ensauvage la dignité de l’homme. Le rendant ainsi insignifiant devant l’Histoire. Quant à la résignation, elle frise l’idiotie et le défaitisme. Elle fait de l’humain une bête de somme taillable et corvéable à merci. La lutte demeure, comme le suggère Sassine, « la voie privilégiée de la mise au monde par soi-même, pour soi-même et pour les autres », pour reprendre ici la belle formule de l’ivoirienne Tanella Boni.
Seulement et peut-être heureusement, nous ne disposons pas des mêmes moyens, même si la lutte est commune et l’objectif identique. Il ya ceux qui usent leur corps, leur temps, leur force, leur nudité ? pour battre le pavé et comme dirait l’autre pour court-circuiter une situation socio-politique pourrie à l’extrême. Il y a ceux qui usent leur voix pour saper les rêves diaboliques des politiques. Avec des cordes vocales on ne peut plus tendues pour raison de couverture médiatique, ils parlent, ils vitupèrent, ils vocifèrent, ils insistent et signent parfois avec une dose malheureuse d’a priori, de préjugés et de parti-pris. Il ya ceux qui usent la plume. Telles les petites pattes du petit poussin de Sassine, leurs plumes font diversion pour dire autrement la lutte, les révolutions et la marche du monde, puisque « l’art ne recourt au réel que pour l’abolir et lui substituer une nouvelle réalité » (Jean Rousset)
A reblogué ceci sur ANAS ATAKORA and commented:
la réflexion suit son cours…